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Geobunnik

Le blog d'un enseignant qui prépare au CAPES et au CRPE en géographie à l'ESPE de Corse à Ajaccio et Corte.

Les recompositions géographiques du monde actuel : les pays émergents (2)

Publié le 14 Décembre 2012 par geobunnik in epistemologie de la géographie

 

2- A l'échelle mondiale, quelles conséquences sur la lecture globale du monde ?

 

2.1. Quelques rappels très rapides sur ce qu'est la mondialisation : voir l'article sur l'épistémologie de la mondialisation :  Les géographes et la mondialisation. 

 

2.2.  Des territoires et des lieux de la mondialisation :

 

a- A l'échelle mondiale :

  • Des territoires marqués par une double logique d'intégration-fragmentation et de marginalisation-exclusion, ce qui, associé à un phénomène d'inégalité et de dualisme liés au mode de développement aboutit à une valorisation différenciée des territoires :

    • La Triade

      • Le terme bien connu est inventé par Kénichi OHMAE en 1985 dans son livre Triade Power: The Coming Shape of Global Competition. Le terme est vite repris par les journalistes et les programmes scolaires.

      • Elle rassemble les État dominants (États‐Unis, Canada, Europe occidentale, Japon) qui contrôlent l'essentiel du pouvoir politique et économique du monde, possèdent les capitaux et maîtrisent les technologies et l'information. Ils sont très bien reliés entre eux par des transports rapides et réguliers.

      • 20 % de la population dispose de 70 % du PNB ou de l’industrie, 85 % de la Recherche-développement, 80 % des services de transports et du stock d’IDE.

      • Peut-on encore parler d'une triade aujourd'hui ? Quelle partie de l'Europe fait partie de la Triade ? L’Europe du nord ? L’Europe de l'ouest ? Le Japon en fait-il encore partie ? Pourquoi ne pas y intégrer les autres puissances, émergentes ?

      • Ces territoires sont-ils égaux ?

        • Les États-Unis : domination économique, politique et diplomatique, culturelle. Mais ce qu'on peut retenir c'est un État qui se remet en question depuis les années 2007-2008, depuis la crise : un pays qui regarde vers l'est, la Chine avec des interrogations sur la position de ce concurrent. En 2009, Barack OBAMA déclare : « les relations entre les Etats-Unis et la Chine façonneront le XXIe siècle »

        • L'Union Européenne : En crise triple :

          • institutionnelle depuis le refus français du traité constitutionnel en mai 2005, mais aussi autour des arbitrages autour de la dette des pays méditerranéens de la zone euro.

          • Économique : une zone qui n'arrive pas a avoir de la croissance économique.

          • Structurelle, il semble que l'UE se découpe en plusieurs ensembles selon plusieurs critères :

            • Euro – pas Euro

            • Dynamiques (croissance) et ralentis

            • Riches – pauvres

            • Atlantistes – européanistes

            • etc.

        • Le Japon : En blocage depuis 1995 et le double choc de la crise bancaire et du tremblement de terre de Kobe. On peut y ajouter depuis un recul relatif au niveau mondial (dépassé par le grand concurrent historique chinois) et depuis Fukushima en février 2011. Une société en crise sur des fondamentaux remis en cause : foi en le progrès technique, foi en ses hommes politiques (corruption, méfiance), foi en l'Etat (après les catastrophes) croissance économique qui semblait sans limite, vieillissement de sa population, place dans le monde en retrait, …

        Pourtant, le Japon reste puissant et présent sur la scène internationale : sa forte dette est détenue par les Japonnais (pas de dépendance comme aux EUou en UE), le Japon ereste le 2° contributeur net au sein des institutions internationales, le FMI pense qu'il sera le 5° pays moteur de la croissance mondiale dans les 5 prochaines années (2012-2017), il reste un foyer d'innovation (3.6 % du PIB en recherhce et développement). Enfin, il n etient pas forcément à laisser le leadership de l'Asie de l'est à la Chine.
      • La Triade existe-t-elle encore ? Forme-t-elle encore le centre du monde (États-Unis : 26 % du PIB mondial + UE 30 % + Japon 9,5 % = 65,5 % de la richesse mondiale)

      • La Triade va-t-elle s'ouvrir à un 4° grand, la Chine ?

    • Les périphéries intégrées qui fournissent :

      • Soit des matières premières agricoles, minières et énergétiques, (Afrique du nord, Moyen Orient, Venezuela, …). Elles connaissent un enrichissement rapide lié à un prix des hydrocarbures élevé. Mais si cet enrichissement permet des politiques sociales populistes ou populaires, il ne règle pas les problèmes sociaux structurels ou pose des problèmes géopolitiques (Venezuela de Chavez, Qatar, …)

      • Soit une main d'œuvre à bon marché pour des productions industrielles (textile, électronique grand public…) qui sont réexportées dans le cadre d'une division internationale du travail. (A noter que seules les pays d'Asie du sud-est ont pu acquérir une certaine autonomie économique grâce à des stratégies de développement volontaristes initiées par l’État en s'appuyant sur des entreprises privées monopolistiques ou non). (Asie du sud-est, Afrique du nord, Mexique, …). Que penser et comment classer les zones franches ? Dans son ouvrage, L´Atlas mondial des zones franches, (La Documentation française, 2010) François BOST en compte 1 735 dans le monde fin 2008. Elles sont présentes aussi bien dans les pays dits de la Triade (16 pays), les pays d´Europe orientale (22 pays), que dans les pays en voie de développement (95 pays). Ces pays ou territoires ne sont que des zones de production pour les entreprises des pays riches et la forte concurrence qui règne ente elles ne permet pas leur décollage technologique (cf. les maquiladoras mexicaines qui sont en concurrence avec les maquiladoras d'Amérique centrale et les ateliers chinois).

      • Soit des aménités touristiques (plages, des montagnes ou des centres de loisirs) pour les occidentaux. Ces territoires peuvent aussi être maritimes (croisières). Même remarque : ces territoires ponctuels, ces sites touristiques sont en très forte concurrence entre eux, soit à l'échelle d'un continent (Djerba, Turquie, Costas espagnoles), soit à l'échelle mondiale (Thaïlande, Caraïbes, Méditerranée)

      • Ces périphéries sont très bien reliées aux centres, elles restent dépendantes de la conjoncture et des décisions des pays de la Triade, même si elles ont pu faire entendre leur voix ponctuellement (OPEP en 1973-1979)

      • Ces pays-ateliers ou régions (maquiladoras) ou zones franches font parfois partie des pays émergents (Mexique, Shenzen, Tanger, …) faut-il garder ce terme ? Cette notion ? L'idée d'intégration prend-elle en compte les migrants, ou les travailleurs dans les usines appartenant à des entreprises du nord (maquiladoras ou autres) ?

      • Ces territoires dépendent des centres, de la Triade. Ils en sont proches géographiquement :

        • Amérique centrale (Mexique y compris) ;

        • Rives sud et est de la Méditerranée

        • Asie du sud-est qui, malgré son envol économique des années 1970-2000 reste dépendante des pays de la Triade ou même sous influence chinoise.

       
       
      •  Il existe aussi des territoires de la mondialisation très connectés au centre mais de manière illégale : les paradis fiscaux. S'il n'existe pas de définition législative des paradis fiscaux, l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) considère qu'il faut quatre critères pour les définir : 
        • impôts inexistants ou insignifiants,
        • absence de transparence, 
        • législation empêchant l'échange d'informations avec les autres administrations, 
        • tolérance envers les sociétés-écran ayant une activité fictive. 
      • Selon le Fonds Monétaire International, 50 % des transactions internationales transitent par des paradis fiscaux. Ces derniers hébergeraient 4 000 banques, les deux tiers des hedge funds et 2 millions de sociétés-écran. Environ 7 000 milliards de dollars d'actifs dormiraient sur ces comptes, soit plus de trois fois le PIB de la France. Selon l'économiste Gabriel ZUCMAN, le montant des avoirs de particuliers détenus dans les paradis fiscaux s'élève à 8 % des ressources financières mondiales.
      • Les pays émergents font-ils partie de cet ensemble ? en partie certainement, on peut penser à Shenzen ou aux maquiladoras, aux ateliers indiens ou aux mins sud-africaines, etc. Des territoires réduits où se concentre la force de travail ou de production des émergents, qui leur donne leur poids économique et aussi géopolitique.
    • Les pays émergents,

      • Notamment les BRIC, Brésil, Inde, Chine, Russie, mais aussi l'Afrique du Sud, l'Indonésie ou le Mexique, qui sont des puissances régionales qui peuvent avoir (pour les BRIC) des ambitions mondiales.

      • Le développement ne s'appuie pas que sur une intégration mondiale (comme les pays exportateurs de matières premières agricoles ou énergétiques ou comme les pays d'Asie du sud-est), mais aussi sur une dynamique interne, un marché intérieur assez vaste.

      • Mais aussi des territoires marqués par le déséquilibre : déséquilibre social (cf. coefficient de Gini du Brésil, de l'Afrique du Sud), déséquilibre territorial (cf. Brésil, Chine), déséquilibre politique (peu de démocraties et poids géopolitique surtout régional).

      • Des territoires qui bouleversent l'ordre établi. Forment-ils un ensemble homogène ? Faut-il séparer les territoires intégrés à ceux qui ne le sont pas ? Comment faire apparaître les personnes qui ne sont pas dans la mondialisation directement mais qui en « profitent » (exemple de la destruction des bateaux à DACCA ou a CHITTAGONG : territoire de la mondialisation à quel titre ?) Voir document extrait de 6 mois.

      • Faut-il les séparer des périphéries intégrées , Sont-ils encore périphériques ? Pourquoi et comment les séparer des autres territoires ? À cause de leur croissance ? De leur poids grandissant ? (PIB des BRICS = Chine 12 % du PIB mondial + Brésil 4,3 % + Russie 3,2 % + Inde 3,1 % + Afrique du Sud 0,7 % = 23,6 % … ¼ de la richesse mondiale)

      • Faut-il séparer la Chine aux ambitions mondiales des autres aux ambitions régionales ?  

    • Les marges évitées ou isolées qui rassemblent :

      • Des pays considérés comme inintéressants par les pays dominants.Ce que Philippe RECKACEWITZ appelle les espaces interstitiels : (voir la carte de l'Afrique dans Le Monde Diplomatique de décembre 2012)

      • Des pays mis au ban pour des raisons politiques (Cuba, Iran, Birmanie, Corée du Nord, …, ). Ils pèsent sur les choix mondiaux de manière indirecte. On redoute plus leur pouvoir de nuisance que leur action directe (terrorisme, déstabilisation régionale, … )

      • Des pays en guerre (Somalie, Afghanistan, ...)

  • Réflexions :

    1. Cette classification bien connue n'est peut-être plus de mise aujourd'hui. Elle permettait de se réconforter : nous sommes toujours au centre du monde et le monde est toujours centré non plus sur la Méditerranée ou l'Atlantique mais au moins sur l’hémisphère nord, d'où l'usage de cartes à centrées sur le pôle nord (vue polaire).

    2. Cependant, comme nous l'avons vu, la mondialisation et l'émergence de nouvelles puissances décale encore le centre du monde, cette fois-ci vers le ou les sud. La notion de sud a vécu, comme celle de pays en développement … On peut difficilement garder la notion de sud pour évoquer cet ensemble très disparate de pays plus ou moins riches, plus ou moins puissants, plus ou moins actifs. L'idée de développement a été enterrée : cela veut-il dire que nous avons pris acte qu'il y a des pays riches et d'autres pauvres et que c'est dans l'ordre des choses ?

    3. Peut-on garder la notion de nord ? Faut-il élargir le groupe des 8 aux 20 ? Faut-il élargir la Triade à un quatrième pays, la Chine ?

    4. La représentation que nous donnons du monde va donc en être changée :

      • une carte centrée sur le Pacifique de manière durable ?

      • Une carte toujours centrée sur le pôle nord ?

      • Une carte toujours centrée sur l'Euroe et l'Atlantique ? Faut-il faire prendre conscience que nous devenons une marge du monde ? Est-ce vraiment le cas ? (Attention à l'Euro-pessimisme)

 

b- A l'échelle régionale :

    • Un principe général : la spécialisation des territoires

      • Cela reprend les idées libérales de RICARDO sur les avantages comparatifs (drap anglais contre vin portugais).

      • Une spécialisation qui peut être choisie, lorsque ce sont les États qui impulse cette spécialisation, notamment dans le domaine industriel : technopoles, régions industrielles, montée en gamme des « dragons » de l'Asie du SE dans les années 1970-1990 1- (1- ateliers de main d’œuvre pour exportation ; 2- formation des jeunes, scolarisation ; 3- création de géants nationaux avec l'aide de l’État ; 4- Développement économique plus équilibré). Dans la majorité des cas, voire la totalité des cas, il s'agit de choix volontaristes soit impulsés par l’État directement (planification ou non) soit indirectement (investissements militaires, pas exemple).

      • Une spécialisation qui peut être imposée, subie, lorsqu'elle est basée sur l'exportation de denrées naturelles ou agricoles : régions minières, pétrolières, terres agricoles louées, régions agricoles notamment de l'agriculture mondialisée, c'est à dire les plantations, les céréales, le soja, l'huile de palme, etc. 

    • Un principe corollaire : la concurrence

      • En reprenant la vulgate libérale, on nous rappelle que la concurrence entre entreprises ou entre territoires est bénéfique à notre développement économique.

      • Cette concurrence est facilitée par l'accélération des échanges économiques, eux-même facilités par la baisse des tarifs douaniers entre États dans le cadre d'accords bilatéraux ou multilatéraux dans le cadre de l'OMC notamment, mais aussi dans le cadre d’organisations inter-gouvernementales, comme l'ALENA, l'Union Européenne, le Mercosur, l'ASEAN, etc.

      • Une concurrence facilitée enfin par la réduction des distances-temps et même du prix du transport de marchandises ou de l’information (dans le cadre de la mondialisation).

      • Cette concurrence s'exerce :

        • entre régions d'un même ensemble ;

        • entre zones urbaines et zones rurales ;

        • entre zones connectées et zones isolées ;

        • entre territoires en général.

  •  
    • Les métropoles et la métropolisation

      • Des centres de décisions économiques (sièges sociaux, banques, bourses, etc.), politiques (gouvernements, parlements, ministères, administrations) ou culturelles (cinéma, théâtre, modes, musiques, journaux, universités, intellectuels, …) et des territoires d'innovation. Allen J. SCOTT et Edward SOJA rappellent que Los Angeles représente ¼ des films produits, 55 % des revenus et 70 % des coûts de production du cinéma mondial.

      • Les fonctions métropolitaines, bien sûr, mais pas seulement. Les métropoles ne concentrent pas que les décideurs, même si ce sont des centres de décisions majeurs à l'échelle mondiale et régionale ou nationale. Le Rapport du PNUD de 2009 sur le développement précise à propose de Shenzen (Chine) : Shenzhen attire de jeunes travailleurs — 90 % des huit millions d’habitants que compte la ville sont en âge de travailler. Elle est spécialisée dans les produits de l’industrie électronique. Mais elle en produit des masses. En 2006, ses exportations ont dépassé celles de l’Inde, faisant de ce port maritime le quatrième port du monde. Dynamisée par les forces de l’agglomération, de la migration et de la spécialisation, et profitant de la proximité avec Hong Kong, province de Chine, Shenzhen s’est développée à un rythme sans précédent en Chine depuis 1979, date à laquelle elle a bénéficié du statut de zone économique spéciale. (La Zone Économique Spéciale de Shenzen : 300 km², 3 millions d'habitants)

      • On peut donc ajouter aux décideurs :

        • les ouvriers ou les « masses » qui produisent : à Shenzen, l'usine Foxconn qui produit les téléphones pour Apple compte 400 000 employés (1/3 du groupe) 

        • des migrants qui vont vers ces métropoles, même si les grands flux d'exode rural ne se dirigent plus vers les métropoles mais vers des villes secondaires dans le monde entier : Si à peine 500 000 Chinois ont émigré à l’étranger en 2005, plus de 150 millions de personnes se sont déplacées en Chine malgré les restrictions imposées (système du Hukou, passeport intérieur chinois de plus en plus remis en question).

        • Un modèle culturel, économique ou social : la métropole représente un modèle : vie urbaine, liberté de circulation et d'action , manifestations, vie nocturne, commerces, etc.

      • Des territoires très bien reliés entre eux par les différents modes de communication : avions, trains rapides (cf encore une fois la Chine et son réseau de TGV), mais aussi informations. On évoque depuis longtemps une mise en réseau des villes (cf l'Archipel Mégalopolitain Mondial d'Olivier DOLLFUS en 1997 ou l'idée de Global metropolitan region d'Allen J. SCOTT en 1997 : Pour DOLLFUS, il existe des grappes de villes mondiales qui articulent local et global. Ces grappes sont formées de nœuds dans une région -les mégalopoles- qui forment des pôles reliés entre eux et qui assurent la direction du monde. Pour SCOTT, chaque noyau métropolitain est le site de réseaux complexes d'activités économiques spécialisés et complémentaires. Chaque noyau est le lieu d'économies d'agglomérations et de rendements croissants qui leur permet de se développer pour devenir toujours plus grands.) ou d'un système de villes mondial. Cette connexion permet une circulation des personnes, des idées, de l'argent, mais aussi des œuvres d'art (les expositions ou les œuvres se déplacent de métropoles en métropoles, comme l'armée de terre cuite de Xi'An ou les expressionnistes)

      • Des métropoles qui organisent le monde actuel autour de territoires fortement urbanisés et articulés que l'on appelle parfois mégalopoles (longtemps on en a compté 3 : en Europe, au Japon, en Amérique du nord-est , mais on peut en ajouter d'autres : en Corée, en Chine du sud, au Brésil, parfois méga-régions. On peut aussi rappeler l'idée d'un archipel mégalopolitain mondial proposé par Olivier DOLLFUS en 1996.

      • Des villes ... en compétition (ou en concurrence) : cette compétition est multiforme :

        • pour obtenir des sièges sociaux, des congrès, des réunions présidentielles ;

        • pour obtenir des rendez-vous planétaires médiatiques et sportifs (JO, coupe du monde de football) ;

        • sous la forme de quartiers de haute technologie (Tsukuba, Silicon Valley, etc. )

        • sous la forme de quartiers emblématiques ou de tours : 40 % des grands immeubles construits dans le monde le sont depuis 2000. Le record étant détenu par le Burj Khalifa à Dubaï (à terme 828 m), suivi par le Willis tower de Chicago (527 m), Tapei 101 (508 m). Pas de métropole sans skyline …

        • sous forme d'images à travers le cinéma, la publicité, le patrimoine, etc.

  •  
    • Les façades portuaires

      • Des ports toujours plus grands, selon les mêmes logiques de concurrence, de volonté de baisser les coûts et de concentration. Il faut accueillir des porte-conteneurs de taille mondiale. Pour cela, il faut des aménagements toujours plus profonds et éloignés de la côte. On connaît le cas de Rotterdam (Maasvlakte 2) ou du Havre (le Havre 2000), mais aussi Shanghai (port de Yangshan : Le nouvel aménagement portuaire en eau profonde de Yangshan a exigé la construction du pont de Donghai de 31,3 km. À l’heure actuelle, les 13 quais en exploitation ont une capacité annuelle estimative de 8,5 millions de conteneurs (équivalents vingt pieds) ; 15,5 m de profondeur sur 5.6 km de longueur de quai. L’objectif de Yangshan est de faire de Shanghai le centre d’éclatement du fret vers les destinations d’Asie du Nord, à l’instar de Singapour pour l’Asie du Sud. Le projet prévoit la construction d’ici 2020 de 5 terminaux avec 30 postes à quai, d’une capacité annuelle de 25 millions d’EVP. Ce port en eau profonde complète les investissements du port de Waigaoqiao, saturé et dont la profondeur est insuffisante pour les navires de nouvelle génération (le tirant d’eau admissible à quai atteint seulement 10,5 m). Le port de Yangshan peut en revanche accueillir des méga porte-conteneurs de nouvelle génération, (8.500 EVP et plus). Shanghai peut ainsi rivaliser avec les hubs portuaires de Hong Kong et de Singapour. Le port a mis en place un programme 5 - 2 - 25 : 5 heures pour charger ou décharger une péniche ; 20 heures pour charger ou décharger un porte-conteneurs ; 25 minutes pour charger (ou décharger) un conteneur de son point de stockage en attente sur son porte-conteneurs.) ; Singapour et ses ports.

      • Des ports articulés selon le principe des hubs and spokes : une organisation hiérarchique marquée par la concurrence, la compétition pour obtenir des marchés, par une course au gigantisme. Un système de relations denses qui se lit à différentes échelles (Monde, bassins, sous-bassins).

      • La littoralisation des économies est due à une augmentation des échanges commerciaux maritimes. Cette littoralisation est un phénomène bien connu en ce qui concerne la Chine et ses trois espaces (littoral, centre, ouest) ou le Brésil. Mais on peut reprendre cette logique pour les autres pays du monde. Cette littoralisation a entraîné la formation de façades littorales articulées autour des ports mondiaux :

        • Rotterdam – Hambourg et la Northern Range ;

        • Shanghai - Ningbo – Tianjin (Pékin) et la façade asiatique ;

        • New York et la Nouvelle Orléans pour la façade nord américaine ;

        • Une façade sud-américaine Atlantique (Brésil-Argentine) ;

      • Certains ports semblent isoles, même si par commodité on les rattache à des façades maritimes. Ces hubs organisent eux aussi le commerce mondial :

        • Singapour

        • Dubaï

        • Durban – Le Cap

         
         

        Ces façades portuaires jouent un rôle dans la recomposition du monde car elles sont porteuses d'enjeux non seulement économiques mais aussi géopolitiques, on le voit dans la concurrence qui se joue entre la Chine et le Japon autour du contrôle des îles et des territoires maritimes (ou « merritoires » de Camille PARRAIN) de la mer de Chine :

        • en Mer de Chine méridionale autour des iles Paracels (occupées par la Chine), des îles Spratley (un peu tous les voisins) ;

        • en Mer de Chine orientale autour des îles Senkaku (ou Diaoyu en Chinois) ;

        • Mais surtout autour du "collier de perles" chinois qui se met en place en Asie du sud.

      • On pourrait suivre la même logique de contrôle des routes maritimes et de « sécurisation » du trafic dans les eaux qui bordent la Somalie et le Yémen : une zone de piraterie dans la Mer d'Oman contrôlée par les marines occidentales. 

    • Les centres de production industriels : 

      • Claude GRASLAND et Gilles VAN HAMME proposent dans un article pour la Commission Européenne en 2010 de classer les régions industrielles du monde autour du concept centre-périphérie en 4 temps de 1975 à nos jours. Selon cette étude (je reprends la conclusion de l'article), il existe  "une forte division du travail entre les espaces centraux, semi-périphériques et périphériques, tant à l‟échelle du globe que de l'Europe. Les secteurs les plus intensifs en travail sont ceux qui ont connu la plus forte relocalisation vers les espaces périphériques, alors que les secteurs qui requièrent la plus forte maîtrise technologique restent largement localisés dans les espaces centraux.

        Cette division du travail ne s'explique pas seulement – comme le veut la théorie classique – par les avantages comparatifs des différents types de territoires. En effet, cette division du travail s'est mise en place historiquement par des mécanismes de domination et de dépendance qui dépassent de loin l'avantage « naturel » des espaces centraux sur le reste du globe (colonisation, subordination aux intérêts économiques du centre, présence d‟une élite locale qui vit des échanges inégaux avec le centre…). Le maintien de cette hiérarchie à travers le temps se reproduit ensuite par de multiples processus :

        • mécanisme de l'échange inégal et tendance à la dégradation des termes de l'échange pour les pays périphériques ;

        • tendance « naturelle » à la concentration des capitaux et de la technologie là où ils sont déjà (processus d‟accumulation/concentration), notamment à travers le rôle des multinationales ;

        • rôle des institutions internationales comme l‟OMC, le FMI ou la Banque Mondiale, qui favorisent une ouverture économique susceptible de maintenir la position dominée dans la division du travail ;

        • rôle spécifique de certaines élites nationales périphériques qui ont souvent supporté les politiques d‟ouverture qui favorisent l‟amélioration de son pouvoir d'achat au détriment d‟un développement sur le long terme…

      Deux processus majeurs sont à l‟œuvre dans ces évolutions : 

      • Premièrement, on n‟assiste pas seulement à une relocalisation des industries intensives en main-d'œuvre vers les espaces périphériques mais aussi à une industrialisation relative de ces derniers. Les hiérarchies entre les types de territoires subsistent mais – dans une certaine mesure – les écarts semblent s‟atténuer. Les espaces semi-périphériques – et dans une bien moindre mesure périphériques – voient leur part dans la production globale augmenter significativement, y compris dans des secteurs comme les machines-outils et la chimie, dans lesquels ils restent néanmoins sous-spécialisés et dépendants. Dans ce processus de relocalisation industrielle à l‟échelle mondiale, les entreprises transnationales jouent un rôle majeur : soit elles investissent directement pour (dé)localiser certains segments de production en périphérie soit elles choisissent de sous-traiter les segments les moins stratégiques de la production dans le cadre d‟une sous-traitance internationale. Dans tous les cas, elles gardent le contrôle sur l‟ensemble de la chaîne de valeur. En conséquence, non seulement la décision économique reste localisée très majoritairement au centre, mais surtout, une grande partie de la valeur produite sur l'ensemble d‟une chaîne de valeur est appropriée par le centre.

      • Deuxièmement, on semble bel et bien assister à une mutation majeure au niveau de la division du travail entre les grandes régions du monde. En effet, l'évolution la plus spectaculaire de ces trois dernières décennies est le poids croissant de l'Asie-Pacifique dans le commerce mondial, essentiellement au détriment de l'Amérique du nord. Ce processus intense n'est nullement en contradiction avec le modèle centre/périphérie, modèle dynamique qui a décrit les changements de centres de l‟économie-monde sur le long terme. La question du point de vue de ce modèle est de savoir si la reconfiguration des échanges commerciaux préfigure le déplacement du centre du centre des États-Unis vers l'Asie-Pacifique, plus précisément vers la Chine. A l'encontre d‟un tel argument, il faut noter que le déclin commercial des États-Unis correspond à une période d'incontestable hégémonie américaine à travers le monde sur le plan politique et économique, notamment à travers la finance. Toutefois, dans une perspective historique longue, ARRIGHI (1999), à la suite de BRAUDEL (1979), insiste sur le fait qu‟une période de prospérité liée à une financiarisation croissante peut être factice. Autrement dit, l'affaiblissement relatif de la base productive et la prospérité croissante par une ponction financière sur le reste du monde serait le signe du déclin proche du centre, idée reprise également par le politologue Emmanuel TODD (2002). Toutefois, les États-Unis ont une position qui n'est pas tout-à-fait identique à leurs prédécesseurs au centre de l'économie mondiale, du fait de leur rôle de soutien à la demande globale. Les États-Unis ont pu soutenir la demande globale grâce à un endettement généralisé – et largement financé par la Chine – en particulier des ménages et des entreprises. C'est évidemment la durabilité de ce modèle de croissance qui est mise en question par la crise actuelle."

      • Les centres de production industriels sont connus. Comment les cartographier et montrer leur poids dans le rééquilibrage actuel du monde ?

        • On les sépare généralement en deux parties : les lieux de la création et de la décision … qui ne sont plus qu'au nord, puisque les entreprises chinoises, brésiliennes ou indiennes possèdent elles aussi leurs centres décisionnels dans les métropoles. De plus les IDE chinois vers les pays d'Europe équilibrent ceux des pays d'Europe vers la Chine (les Chinois ont investi 11 milliards d’euros en Europe en 2011, contre 7 milliards d’euros investis par les Européens en Chine. La France est devenue en 2011 le premier investisseur européen en Chine ; et le 3ème pays destinataire des investisseurs chinois)

        • Les lieux de décision sont localisés (voir première partie)

        • Les lieux de production restent aussi au nord, pas qu'au sud malgré le processus de désindustrialisation que connaît notre continent Voir l'article de Laurent CARROUE dans Le Monde Diplomatique de mars 2012 dans lequel il rappelle les faits suivants :

          • l’industrie joue toujours un rôle majeur dans l’organisation des territoires ;

          • Entre 1990 et 2010, l’Europe à 30 (les 27 pays de l’Union européenne plus l’Islande, la Norvège et la Suisse) tombe de 36 % à 24,5 % de la production. Un phénomène accéléré par la crise : entre le début de la crise, à l’automne 2008, et la fin de 2010, l’Union a perdu plus de quatre millions d’emplois industriels, soit 11 % de ses effectifs. La France est devenue le pays le plus désindustrialisé parmi les quatre grands de la zone euro (les trois autres étant l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie) ; entre 1980 et 2011, les emplois industriels y sont passés de 24 % à 13 % du total des emplois. (Certaines tâches de conception, de maintenance ou même de secrétariat sont ainsi répertoriées comme des services alors qu’elles étaient auparavant inclues dans la production. A cela, il faut ajouter la baisse d’effectifs liée aux gains de productivité, qui représente environ 30 %.)

          • En 2011, la Chine est devenue la première puissance industrielle du monde, mettant fin à un siècle d’hégémonie américaine.

          • Le Brésil, désormais sixième économie de la planète, a devancé la France pour la production industrielle ;

          • La Corée du Sud a dépassé le Royaume-Uni, lui-même talonné par l’Inde.

            (source : «  World manufacturing production 2010  », IHS Global Insight).

          Selon CARROUE, on assiste à une nouvelle Division Internationale du Travail avec une architecture multipolaire : « entre 1990 et 2010, les profits des deux cent vingt plus grands groupes européens réalisés dans les pays émergents sont passés de 15 % à 24 %. Les logiques de localisation des transnationales en sont bouleversées. » Les délocalisations étant motivées à la fois par la recherche de coûts de productions plus faibles mais aussi par la recherche de marchés nouveaux (les classes moyennes urbaines solvables)

          De plus, les émergents deviennent meilleurs dans des domaines autrefois réservés aux pays du nord : télécommunications, aéronautique, trains à grande vitesse, nucléaire, industries navale et spatiale... Des avancées liées à des transferts de technologie.

        • Les sites de l'innovation en sont changés. CARROUE cite le « triptique chinois » autour du facteur humain , du facteur financier et du facteur technologique :

          • 1,15 million de chercheurs, soit un potentiel équivalant à 82 % des capacités américaines et à 79 % de celles de l’Union européenne ; selon la National Science Foundation américaine, elle devrait rassembler 30 % des chercheurs mondiaux d’ici à 2025.

          • En 2009, Pékin a affiché un budget de recherche qui le hisse au deuxième rang mondial, encore assez loin des États-Unis, mais devant le Japon.

          • En 2011, la Chine est devenue le premier déposant mondial de brevets, grâce à une stratégie nationale qui souhaite passer du made in China (« fabriqué en Chine ») au designed in China (« conçu en Chine »).

        • La Chine produit ½ des panneaux solaires mondiaux, elle dispose du premier parc d'éoliennes au monde

  •  
    • Les centres de production tertiaires : les mégalopoles ? Les méga régions ? Les technopoles mondiaux ?

      • Je ne développe pas les territoires des élites : les centres d'affaires centraux ou périphériques de villes, leur lieux de logement ou de villégiature, les aéroports et autres territoires de décision politique, économique ou culturelle. 

         

      • A côté de ces territoires des élites très discriminants, il y a d'autres territoires tertiaires discriminants : les lieux du tourisme. (5% du PIB  mondial et 6 à 7% des emplois mondiaux). Trois grands pôles touristiques dans le monde :

        • l'Europe et la Méditerranée, premier bassin mondial avec 375 millions de touristes internationaux en 2004 (49 % du marché mondial mais 59,5 % au début des années 1990). Le cœur du bassin est les rives méditerranéennes de l’Europe, de l’Espagne à la Turquie (23,3 millions de touristes en 2007), puis s’étire sur les rives nord-africaines, vers le Maroc (7,45 millions en 2007 contre 2,6 en 1990), la Tunisie et l’Egypte. Une auréole secondaire se dessine au nord de la zone centrale (le reste de la France, Pays-Bas, Norvège, Pologne et quelques lieux privilégiés de la Russie et de l’Ukraine).

        • l'Asie de l'Est (surtout Chine), 155 millions de visiteurs internationaux en 2004, soit 20 % du marché mondial (16,2 % en 2000). Cet ensemble est dominé par les flux asiatiques consolidés par l’apport des voisins australiens et néo-zélandais.

        • les Caraïbes et États-Unis, 125 millions de touristes, principalement venus des États-Unis

        Des territoires aux marges des coeurs décisionnels, mais qui sont aussi des territoires d'autres productions (industriels, humains).
  •  
    •  Les centres de production agricole :
      • Eux aussi, comment les placer sur une carte ? Que faut-il prendre comme critères ? 
        • Les régions exportatrices : greniers à blé ; soja, plantations (palme, café, thé, fruits exotiques, …)
        • Les terres agricoles achetées par les étrangers ? Le phénomène d'accaparement des terres, ainsi que le qualifient ses détracteurs, s'est accéléré à la fin des années 2000, avec la hausse des prix alimentaires. Il touche l'Afrique (62 % des transactions), l'Asie du Sud-Est (plus de cinq millions d'hectares ont fait l'objet de transactions vérifiées aux Philippines, ce qui en fait le pays du monde le plus concerné) et – à un degré moindre – l'Amérique latine. Les principaux investisseurs sont les pays émergents, emmenés par la Chine, ceux du golfe Persique, qui cherchent à assurer leur sécurité alimentaire, ainsi que les pays anglo-saxons. Le rapport basé sur Land Matrix montre que l'exportation des cultures est l'objectif de la majorité des projets, et dans un peu moins de la moitié de ces cas, à destination du pays d'origine de l'investisseur. 
        • Les lieux des négociations commerciales ? En effet, l'enjeu de l’agriculture concerne surtout les négociations internationales autour du commerce dans la cadre des négociations de l'OMC. On assiste depuis une vingtaine d'années à une redistribution des cartes lors des négociations. Fini le temps où seuls les EU et l'Europe négociaient entre eux les tarifs agricoles. Désormais, il faut faire avec : 
          • le groupe de Cairns, un groupe de 19 pays libéraux, qui veulent un marché libre de droits pour vendre leurs productions principalement céréalières (Afrique du Sud, Argentine, Australie, Bolivie, État Plurinational de, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Guatemala, Indonésie, Malaisie, Nouvelle-Zélande, Pérou, Pakistan, Paraguay, Philippines, Thaïlande, Uruguay) ; 
          • le G20, groupe de 23 pays qui cherchent à obtenir des réformes ambitieuses de l’agriculture dans les pays développés, avec une certaine flexibilité pour les pays en développement (à ne pas confondre avec le G 20 qui regroupe des ministres des finances et des gouverneurs de banques centrales, et ses récentes réunions au sommet) ;  
          • le G 33, aussi nommé “Amis des produits spéciaux” dans le secteur agricole souhaitant une certaine flexibilité pour les pays en développement pour leur permettre d’ouvrir leurs marchés de façon limitée dans le secteur agricole (parmi lesquels : Côte d’Ivoire, Chine, Inde, Indonésie, Kenya, Madagascar, Nigeria, Corée, Turquie) ;
          • Les PEV, petites Économies vulnérables (15 pays) ; 
          • etc.
      •  Les pays émergents jouent un rôle de plus en plus fort dans les négociations internationales ; notamment le Brésil : 
        • Avec les autres membres du G20, il dénonce tout ce qui peut limiter la concurrence et créer des distorsions à l’exportation. (pour la fin des subventions, la réforme des organismes d’État de soutien, contre les aides alimentaires et les programmes de crédits aux exportations).  
        • Il souhaite une plus grande égalité en matière de conditions productives : il voudrait que les aides nationales à la production soient revues à la baisse afin d'obtenir une meilleure présence sur le marché nord-américain.
        • Il s'oppose à la PAC.
        • Il propose de réduire les barrières tarifaires.
        • Il voudrait obtenir, entre autres, un meilleur accès au marché européen (viandes, sucre, éthanol, produits laitiers).
        • Il souhaite une plus grande ouverture de marchés très protégés (Norvège, Suisse, Japon, Corée).
        • Il tente aussi de mieux accéder aux marchés de ses grands partenaires du G20, en l’occurrence l’Inde et la Chine, à qui il propose, comme à tous les pays en développement, de bénéficier d’un traitement spécial et différencié.
        • Le Brésil joue donc à la fois un rôle de meneur et un jeu personnel : une face sud-sud, égalitaire. Cependant, le Brésil peut aussi user de subventions : en 2004, près de 3% du produit agricole brut brésilien a bénéficié de soutiens étatique (moins que les États-Unis (20%) ou l’UE (34%)) mais l’existence de ces soutiens discrédite quelque peu le discours libéral brésilien, d’autant que leur part dans le PIB agricole s’avère nettement supérieure à 3% dans certains États agro-exportateurs comme le Mato Grosso. En effet, comme en France, les aides accordées par le gouvernement brésilien bénéficient essentiellement à un nombre réduit de producteurs et ne concernent le plus souvent que quelques productions.

 

  •  
    • Les territoires oubliés, isolés (repartir sur la carte de l'Afrique de Philippe RECKACEWITZ) :
      • Des territoires peu spécialisés, ruraux et agraires mais pas des puissances agricoles : comment les qualifier. Leur poids politique est faible.
      • Des territoires peu accessibles : des zones de montagnes, de désert et de forêt ou des zones maritimes. Ces territoires en marge de la mondialisation sont pourtant parfois au cœur de celle-ci … par le pouvoir de nuisance qui peut s'en dégager et, malgré les moyens que l'on peut y placer, ils sont difficilement contrôlables :
        • Sahara (Aqmi, Touaregs, … voir carte Mali) ;
        • Le Golfe d'Aden ;
        • Les montagnes du monde (Cachemire, Afghanistan, Colombie, …) ;
        • Les forêts (Birmanie : Kashin, Karen,), Laos (Hmongs), Colombie (Farcs et autres groupes, …) ;
      • Des pays enclavés qui ont un poids et un rôle très marginal (Mongolie, Gambie, Lesotho, Malawi, …) ;
      • Des territoires volontairement isolés (raisons diplomatiques, géopolitiques, …) : non plus des pays, des Etats mais des régions, des teritoires plus restreints.

c- A l'échelle locale : 

 

  • Les centres décisionnels : 
    • Les quartiers d'affaires ;
    • Les centres ville ;
    • les edge cities ;
  • Les territoires de la production :
    • les territoires industriels ;
    • les territoires des nouvelles technologies ou de l'innovation ;
    • les territoires de la production culturelle ;
  • Les territoires de la relégation :
    • les quartiers pauvres ;
    • les ghettos ;
    • les bidonvilles ;
    • les périphéries isolées du périurbain pauvre ou appauvri.

 

2.3. Les paysages de la mondialisation

  • On peut lire avec plaisir l'ouvrage de Denis RETAILLE, Les lieux de la mondialisation, Éditions le Cavalier bleu, 2012. Lors de sa conférence à St Dié (déguisée en café géo dans une salle trop petite), Denis RETAILLE est parti d'une photographie prise en octobre 1981 dans le désert tchadien. On y voit trois hommes près d'un acacia, un à pieds, deux à dos de chameau dans le sable du désert, dans une lumière dorée. C'est un marché, un échange entre un vendeur d'armes libyen, un acheteur tchadien près d'un village haoussa. L'idée est de montrer ce qu'est un lieu : un espace qui se définit par l'annulation des distances, un espace éphémère (mais un éphémère qui peut durer parfois) qui n'a plus de dimension. Quand le lieu est fini, il ne reste qu'un site qui lui est marqué par le temps, la distance, les trois dimensions.

    1. Son premier lieu est la base Scott-Amundsen en Antarctique, un lieu à l'écart du monde mais géré par le monde : coopération scientifique

    2. le Nunavut pour évoquer l'autochtonie (un concept issu du monde mondialisé : la protection des hommes « premiers » et de leur culture par les hommes « modernes » ou « civilisés » …)

    3. Jérusalem, un lieu urbain, avec le mur, symbole de la ville et de l'anti-ville

    4. La Toile, à partir d'une image virtuelle des communautés. Un lieu vu souvent comme un non lieu alors qu'il est organisé.

    5. La City, un lieu offshore au cœur de Londres. Ce n'est pas Londres mais une autre municipalité où les électeurs sont les 12 000 habitants + les 35 000 sociétés présentes …

    6. Dubaï, lieu de l'artifice (Burj Khalifa est toujours montrée finie, alors qu'elle est loin de l'être, tourisme, immobilier) mais aussi lieu de trafics (commerces perles, marchandises, port, … ) et des inégalités (80-90 % de migrants sous payés)

    7. Dharavi, à partir des deux enfants du film « slumdog millionaire », deux acteurs musulmans dansun film britannique. Il se moque alors d'un bidonville mis en spectacle mais aussi nécessaire pour faire la révolution (Mike DAVIES) alors que les bidonvillois ne sont pas écoutés.

    8. Porto Allegre, un lieu de spectacle de la mondialisation, car ses acteurs prônent une autre mondialisation, plus la démondialisation.

    9. L'ONU à NY, pour son architecture mondiale (Oscar NIEMEYER et Le CORBUSIER)

    10. Le Monde à un moment où le monde mondialisé se confond presque avec l'écoumène.

    Par la suite, Denis RETAILLE s'est lancé dans une réflexion sur la différence entre les paysages du monde et les paysages de la mondialisation : des paysages identiques mais avec un regard différent ou car la distance a changé ?

  •  
    • Les paysages de la mondialisation ont en commun une saillance, c'est à dire que ce sont des lieux marqués par le spectacle de masse : une très grande partie de la population tourne son regard vers ce lieu, comme Neil Armstrong sur la lune, … lieu de la mondialisation ? Woodstock ? La fille sous le napalm ?

      Ces images du monde aboutissent parfois à un monde folklorisé, à des icônes terrestres ou géographiques.

    • Les paysages ont changé car la distance a changé à cause du tourisme, des transports, des communications. Mais cette réduction de la distance n'a pas transformé les lieux, elle a mis en avant les sites (UNESCO, ...)

 

  • Les lieux et territoires de la mondialisation sont de plusieurs ordres :

    • les lieux de la domination ou de la décision : les CBD, les réunions du G20 ou des altermondialistes, etc. Ce sont ceux qu'on montre aux élèves en priorité.

    • Les lieux et territoires de la production : usines, maquiladoras, ateliers, champs de pétrole, plantations, …

    • Les lieux et territoires de la relégation : quartiers pauvres, ghettos, bidonvilles, …

    • Les lieux et territoires des flux : ports, océans, porte-conteneurs, …

    • Les lieux et territoires enjeux de la mondialisation : les pôles, les fonds marins, les forêts tropicales humides, …

    • Les antimondes de la mondialisation, l'envers du décor de la mondialisation : les dortoirs de Schenzen, les dhows de Dubaï, les nappes de déchets sur les océans, …

 

  • Chacun de ces lieux a ses propres paysages bien connus.

3- Un nouvel équilibre du monde ?

 

3.1. -Une hiérarchie du monde qui change ?  

 

Assurément, avec: 

  • La fin de l’hyper puissance (à relativiser quand même, cela ne veut pas dire la fin de la puissance des Etats-Unis et de leur domination mondiale. Ils restent à ce jour le seul acteur politique global, mondial) ;
  • Un nouveau couple dominant : Chine / États-Unis, mais qui laisse (malgré lui) de la place pour les autres;
  • Un monde en évolution, un basculement du monde, un changement fort qui peut apparaître comme un rééquilibrage.
  • Des lieux et des territoires en évolution aussi.
  • Quelle hiérarchie faire et autour de quels critères ?
    • La puissance économique – politique – culturelle ?
    • La croissance – la montée – l'influence ?
    • Quels territoires et quels lieux de la géopolitique et de la géo-économie mondiale ?

3.2. Des flux qui changent de direction ?   


  • Des flux nord-nord toujours :
    • Ils continuent de dominer les échanges (IDE, tourisme, informations, internet), mais cela est en train de changer => G20, IDE, ...
    • Des flux nord-sud qui continuent mais qui se tournent de plus en plus vers les pays émergents : remises, investissements, ...
    • Ils prennent la forme d'accords de libre échange avec des partenaires commerciaux proches : ALENA, accords entre UE et pays méditerranéens (puis partenariat euro-méditerranéen). Cela aboutit à une régionalisation des échanges.
    • Ils ont pris la forme connue des IDE japonais en Asie du sud-est.
  • Des flux sud-sud à relativiser (sont-ils vraiment égalitaires ? )
    • Ils restent faibles : autour de 6 % ou 23 % des échanges commerciaux mondiaux (ça dépend des sources) ?
    • Ils sont surtout au départ de quelques pays, les BRICS, et vers des pays qui deviennent leurs marges ou leurs marchés : exemple de l'Afrique, de l'Amérique latine, de l'Asie centrale ou du sud. Les entre pays non émergents sont très faibles (-1 % du commerce mondial) ;
    • Ces flux sont plus difficiles, car contrairement à ce qui se passe entre les pays du nord, les échanges sont souvent contrariés (tarifs douaniers deux fois plus élevés, difficultés administratives, réseaux inexistants, axes mal desservis, etc. )
    • Des flux politiques ou des influences qui grandissent : en Afrique par la volonté des occidentaux de se désengager politiquement de ce continent (mais cela prend du temps), en Asie par la montée de la Chine, en Amérique par la montée du Brésil. Mais même si les occidentaux prennent moins de place, ils sont toujours présents (interventions directes comme en Cote d'Ivoire ou indirectes comme au Mali);
    • Des flux de migrants aussi importants que les flux sud-nord et flux de réfugiés nombreux, mais qui n'entrent pas en première information.
  • Des flux sud-nord qui continuent:
    • Flux de matières premières (hydrocarbures, agricoles, minières) ;
    • Flux de migrants ;
    • Flux de cerveaux; les migrants qualifiés  (brain drain ou brain gain ?) ;
    • Mais ces flux humains sont contrariés par la série de murs qui se construisent autour des territoires les plus riches. 

 

3.3. Du G8 au G20 ou du G2 au G20 ? Quelle gouvernance mondiale ? Quels lieux de la gouvernance mondiale ?

  • Un G2 : EU-Chine ? La "Chinamérique", vue comme une nouvelle chimère, nouveau monstre près à dévorer tout sur son passage. Les liens entre les deux pays sont forts et malgré des appels politiques à rompre le tandem, celui-ci est appelé à fonctionner ensemble : la Chine a besoin du marché américain pour vendre ses produits car son économie reste prioritairement tournée vers les exportations et les États-Unis ont besoin des fonds chinois pour combler ses déficits. (La dette publique américaine due à la Chine, sous forme de bons du Trésor, se chiffre à 1.200 milliards de dollars (¼ des bons du trésor). La Chine est le principal créancier de l’économie américaine, et cette somme est comparable au montant du déficit du budget américain qui s’élève à 1.840 milliards de dollars.)
  • Le G8 ?  Les pays du nord qui ont commencé à se concerter dans les années 1975-76 (d'abord 5 puis 6 et 7 pays avant d'intégrer la Russie post-soviétique) Ils regroupent plus de la moitié du PIB mondial. 
  • Le G20 ? 90 % du PIB mondial, 85 % du commerce mondial ou encore 2/3 de la population mondiale. Un groupe qui commence à se former à la fin des années 1990 mais qui prend la forme actuelle à partir de 2008 et de la crise financière. Une ouverture rendue nécessaire par la crise économique. Ce sont des réunions de chefs d’État où chacun s'engage:
    • 2009 Londres : meilleure gouvernance des marchés financiers, liste noire des paradis fiscaux, 1 000 milliards de dollars au FMI ;
    • Séoul 2011 : les émergents augmentent leur part dans le FMI : 6%)
  • L'ONU ? On peut aussi évoquer les tractations autour de la réforme de l'ONU depuis quelques années. Quelques groupes se sont fait entendre :
    • Le G4 (Inde, Brésil, Japon et Allemagne) a fait une tentative en 2005 qui n’a pas abouti. Il proposait la création de 6 nouveaux sièges permanents (les 4 membres du G4 et 2 pays africains) sans droit de veto et de 4 nouveaux non permanents. Cette proposition a rencontré l’opposition de deux groupes numériquement importants :
      • les pays rassemblées au sein du groupe « Uni pour le consensus » derrière l’Italie, l’Argentine, le Pakistan et le Mexique, plaident pour un élargissement uniquement dans la catégorie des membres non permanents. Ils ont ainsi proposé 10 nouveaux non-permanents ;
      • l’ensemble des pays africains s’est rassemblé derrière « le consensus d’Ezulwini », proposition qui demande deux sièges permanents avec droit de veto et deux sièges non permanents supplémentaires pour l’Afrique (L’Afrique en détenant trois actuellement).
    • L’Union Africaine en 2005 propose 26 membres dont 6 ont le droit de veto. La répartition permet à l'Afrique de gagner quelques sièges pour être mieux représentée : elle veut 2 sièges permanents et 5 non permanents. Mais l'accord entre ces États est fragile, le Nigeria n'hésitant pas à l'allier avec le groupe des 4, d'autres puissances régionales étant en concurrence (Algérie, Afrique du Sud, Sénégal, ... ).
    • La proposition "Unis pour le consensus", posée par des puissances moyennes ou régionales comme l'Italie, l'Argentine, le Pakistan et le Mexique, le Canada, la Colombie, l'Espagne propose à côté des 5 permanents un groupe de 20 non permanents.
    • Les États Unis campent sur la fermeté et se disent prêt à accepter un Conseil de 20 pays, dont deux nouveaux membres permanents, mais sans droit de veto.
    • La Suisse, le Liechtenstein, le Costa Rica, la Jordanie et Singapour se sont réunis pour former le groupe des Small Five (S5) et ont proposé leur propre réforme des méthodes de travail du Conseil de sécurité :
      • des processus de travail plus transparents du Conseil de sécurité,
      • une meilleure intégration des non-membres,
      • la prise en compte plus importante des pays contributeurs de troupes,
      • l’organisation plus fréquente de séances ouvertes,
      • ainsi que l’obligation des membres permanents de justifier un recours au veto.

Si des améliorations ont pu être réalisées au niveau de la transparence, les États-Unis et la Russie ont surtout montré leur refus de ce processus. 

 

3.4. Hard power et soft power des puissances émergentes (vu dans la première partie)  

 

  • Une puissance aux vues mondiales : la Chine, même si les tensions sont surtout visibles en Mer de Chine, on pense à la présence chinoise en Afrique noire, au Maghreb (Algérie), à son discours d'égal-à-égal et du gagnant-gagnant « décomplexé » (sans discours moralisateur comme celui des occidentaux).
  • Des puissances régionales actuellement :
    • Inde dans l'Océan Indien ;
    • Brésil en Amérique du sud, mais pas seulement (Iran, Afrique lusophone et autre);
    • Russie avec son "étranger proche" ;
    • Afrique du sud en Afrique Australe.

 

4. Quelle carte du monde aujourd'hui ?

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