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Geobunnik

Le blog d'un enseignant qui prépare au CAPES et au CRPE en géographie à l'ESPE de Corse à Ajaccio et Corte.

Les territoires de l'agriculture en France

Publié le 23 Mai 2013 par geobunnik in CRPE Ajaccio

L'économiste Laurent DAVEZIES pense qu'en France on trouve 5 catégories de territoires : des territoires à dominante productive ; des territoires à dominante publique (les emplois y sont majoritairement fournis par les administrations), des territoires à base sociale (où les revenus sont issus des transferts sociaux) ; des territoires à base résidentielle (peu productifs et consommateurs) et enfin les grandes villes et métropoles. On peut se demander si les territoires agricoles ne font partie que de la première catégorie ou s'ils ne font pas partie des quatre premières. En effet, les territoires agricoles sont marqués par une grande diversité : de richesse, de population, d'activités agricoles, etc. Une diversité qui tend à augmenter et on semble assister à une division profonde entre deux ou trois modèles territoriaux.

 

1- La moitié du territoire français

  • 53 % de la superficie de la France est occupée par des terres agricoles mais seulement 32 % est cultivé (la Surface Agricole Utile, SAU).

  • Des terres agricoles assez nombreuses donc, même si elles sont mal réparties. On trouve trois grands types de territoires  :

    • Des territoires intégrés aux échanges internationaux

      • Des grandes plaines agricoles au nord de la France (Beauce, Picardie, Champagne, Nord Pas de Calais) et un grand bassin au sud-ouest (l'Aquitaine) qui se sont spécialisées dans les cultures céréalières ou industrielles (blé, maïs, betterave, …).

      • Des terres marquées par le bocage où les cultures sont plus rares, laissant place à des élevages de plus en plus industriels (Bretagne, Normandie, Ouest) : porcins, bovins, élevages avicoles.

      • Des terres viticoles ou vinicoles (Champagne, Bordelais, Bourgogne, Val de Loire, Languedoc, Corse, …).

    • Des territoires associés aux zones urbaines :

      • Des terres spécialisées dans le maraîchage ou les cultures sous serre : dans les territoires périurbains, sur le littoral méditerranéen.

    • Des territoires plus isolés qui connaissent une déprise agricole :

      • Des terres de moyenne montagne où la polyculture et le petit élevage (ovin ou bovin voire porcin) continuent de manière traditionnelle (Vosges, Jura, Massif central, Corse).

      • Des productions tropicales spécialisées (Canne à sucre à la Réunion ; Bananes à la Martinique ou en Guadeloupe) dans les Régions Ultra-Périphériques.

 

  • Ces terres connaissent une certaine spécialisation depuis une cinquantaine d'années :

    • Le modèle copié est celui de la Bretagne (ou modèle breton) qui a vu une intensification massive des moyens de production (argent, machines, intrants) afin de rendre l'agriculture bretonne rentable, intensive et exportatrice.

    • Cette spécialisation est visible dans certains territoires où la monoculture est devenue la norme :

      • Bassin parisien

      • régions bretonnes

      • croquis.

    • On assiste aussi à une concentration des exploitations agricoles : celles-ci sont toujours plus grandes, plus mécanisées et emploient toujours moins de personnes (moins d'un million d'agriculteurs aujourd'hui, soit 3 % des actifs). Depuis 1988, ½ des exploitations ont disparu.

 

2- Des pressions sur ces territoires à différentes échelles :

  • Europe et monde : une concurrence accrue

    • La mondialisation des échanges fait que ces territoires, notamment les plus performants (terres céréalières du Bassin Parisien ou vignobles du Bordelais, Bourgogne, Champagne) sont en concurrence avec des territoires éloignés : Chili, Californie, Australie pour les vins ; Grandes Plaines des États-Unis ou du Canada, terres noires d'Ukraine ou de Russie pour le blé.

    • A l'échelle Européenne, l'ouverture des frontières et a constitution du Marché Unique en 1986 ont mis en concurrence le productions françaises avec celles du reste de l'Europe : fruits et légume sou vins des pays méditerranéens de l'Union Européenne ; produits laitiers allemands, viandes britanniques, etc.

    • Cette ouverture aux marchés européens s'est accompagnée d'une politique d'aide de la part de l'Union Européenne : la PAC, ou Politique Agricole Commune dont les objectifs sont doubles aujourd'hui :

      • d'une part produire toujours plus et rester compétitif sur le marché mondial ;

      • d'autre part continuer à produire dans les territoires isolés ou difficiles (montagnes, îles, régions pauvres).

Cela a donc mis en concurrence des territoires semblables au sein de l'UE.

 

  • France : une politique qui oublie ces territoires ?

    • Pressions écologistes sur ces terres qui sont parfois source de pollution : la concentration, l'industrialisation ont abouti à l'usage massif d'intrants ou à la production massive de déjections das la nature. Cela a provoqué des pollutions des nappes phréatiques (Beauce, Bretagne) ; les eaux du robinet sont parfois devenues impropres à la consommation humaines. De plus les eaux ruissellent vers les mers provoquant, comme en Bretagne la profusion d'algues vertes sur les plages (70 000 m3 par an).

    • Pression sociale : les agriculteurs sont accusés de polluer les sols mais on leur demande aussi d'être les gardiens des paysages actuels ou passés ; une fonction qui dépasse leur métier qui est de produire des aliments.

 

  • Urbain : une pression foncière forte et l'artificialisation des terres

    • L'extension urbaine de ces trente dernières années s'est faite principalement sur les terres agricoles. Celles-ci ont été amputées de 76 000 ha / an dans les années 2000, un rythme qui s'est accéléré par la suite (84 000 ha/an ces dernières années), soit l'équivalent d'un département en 10 ans.

    • Cette artificialisation des terres s'est faite au détriment de bonnes terres du Bassin Parisien, par exemple mais cela est visible également autour de toutes les villes et métropoles de France.

    • Dans les zones isoles, la pression urbaine est faible, mais on assiste quand même à un recul agricole : les agriculteurs n'y trouvent pas de repreneur.

 

 

3- Une France du vide ?

  • des faibles densités de population :

    • Les régions agricoles, les territoires agricoles sont ceux de la France du vide : les densités population y sont faibles : 10-30-50 habitants par kilomètre carré.

    • Si la France rurale continue de perdre de la population, cela se fait au profit de régions rurales connectées aux villes, le para-urbain ou le suburbain.

      • Les territoires agricoles isolés sont ceux d'une population isolée, mal connectée aux réseaux de transport, les services s'y réduisent (que ce soient des services publics ou des services privés marchands : la boulangerie, le bistrot, …)

      • Les territoires agricoles plus proches de l'urbain sont mieux desservis et connaissent une hausse de la population, mais une population non agricole, urbaine qui peut entrer en conflit avec les agriculteurs (bruits, nuisances olfactives, choix politiques, loisirs, …)

 

  • des populations vieillies

    • Le vieillissement de populations agricoles est avéré depuis des dizaines d'années notamment dans les territoires les plus isolés et les plus dépendants des aides. Ce sont sur ces territoires que l'on trouve les agriculteurs les plus âgés (plus de 60-65 ans) et les exploitations les plus petites et les moins rentables.

    • Le nombre de jeunes agriculteurs ne cesse de baisser lui aussi, loin de combler les départs à la retraite des baby-boomers.

    • Il est intéressant de noter que les régions les plus vieillies sont aussi celles de régions riches ou d'agriculture intensive : voir carte.

 

  • des territoires sous perfusion économique ?

    • Pour reprendre les idées de Laurent DAVEZIES, les territoires agricoles font aussi partie des territoires aidés où les subventions et les revenus sociaux peuvent être importants.

    • En effet, certains territoires riches comme les bassins céréaliers bénéficient d'aides ou de subventions directes ou indirectes pour faciliter la production et surtout l'exportation des productions à un prix proche de ceux du marché mondial.

    • De même les régions isolées bénéficient d'aides directes (par exploitation) indépendantes de leur production afin de garder des agriculteurs dans ces territoires difficiles d'accès (montagnes ou régions isolées).

 

On assiste donc à un creusement des inégalités entre les territoires agricoles : entre les territoires riches et connectés d'une part ; des territoires para-urbains menacés par l'artificialisation des sols d'autre part et enfin des territoires agricoles isolés menacés par la déprise.

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