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Geobunnik

Le blog d'un enseignant qui prépare au CAPES et au CRPE en géographie à l'ESPE de Corse à Ajaccio et Corte.

Docs pour la France des marges 2 : spécial Calais

Publié le 2 Février 2017 par geobunnik

Vous avez pu entendre ou lire Michel Agier sur ce sujet, je n'en rajoute pas.

Michel Agier, Les migrants et nous, comprendre Babel, CNRS éditions, 2016. Un essai court (55 pages - 5 €) et brillant qui rappelle que la relation qui se crée depuis qq années entre "nous" et "eux" est une construction intellectuelle qui (nous) permet d'essayer de comprendre la vague migratoire actuelle venue du Moyen Orient. . A partir de cette césure (nous/eux), Michel Agier prend le parti de la cause des migrants (premier chapitre), des individus (donc des êtres humains comme nous) en fuite, en souffrance qu'il faut voir avec compassion et à qui il faut offrir (et donc aussi rendre). Ces flux s'inscrivent bien dans une lecture géographique d'inter-relations et d'inter-actions. Parmi ces relations, il y a la peur qui pousse au refus, mais aussi l'identification à l'autre (par sa propre histoire ou par exotisme). pour Michel Agier, on ne peut accueillir l'Autre ("eux") sans prendre du recul, décentrer le regard sur ces "migrants", "réfugiés" ou "immigrés" (trois mots qui sont porteurs de messages différents, trois mots aussi issus de temps, donc de sociétés différentes).  Le second chapitre s'attarde sur le passage entre le "chez eux" et le "chez nous" : l'importance des frontières. Cela enrichit encore la réflexion actuelle sur les frontières, puisque Michel Agier parle des "hommes-frontières" : des errants (plus que des nomades) qui portent en eux leur aventure, des "métèques" qui restent à la marge de la société, des "parias" qui peuvent vivre reclus dans des camps (camps à voir comme des "brouillons de ville"). ces nouvelles frontières du monde sont ces camps que Michel Agier a décrit avec d'autres dans Un monde de camps (La découverte, 2014). Des camps où se construit une nouvelle urbanité, un autre cosmopolitisme (pas celui des élites, mais celui des petits, des sans grades, des petites mains de la mondialisation) par des personnes qui veulent prendre part au Monde en tant que société (relire Michel Lussault).

Pour l'écouter : branchez votre cerveau sur France Culture : https://www.franceculture.fr/personne-michel-agier.html

 

Après cette apologie d'un anthropologue et ethnologue, revenons à la géographie et aux articles du Monde sur ce sujet.

Les trois premiers (sur les mineurs, 18 février 2016; sur le camp, 13 avril 2016, idem, 30 aout 2016 avant sa destruction) sont descriptifs sur les conditions de vie dans cette enclave.

Le suivant évoque le camp de Grande Synthe (8 mars 2016)

 

Docs pour la France des marges 2 : spécial Calais
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A ces articles, je vous conseille de lire les articles suivants :

  • Ceux de la revue du GISTI, Plain Droit, notamment le numéro 2015.1 (n°104) consacré aux jungles aux frontières de l'Europe (voir http://www.gisti.org/spip.php?article4898). Ce numéro du Groupe d'Information et de Soutien des Immigré-e-s vous rappellera le nombre et la localisation des jungles en France (7 si j'ai bien compté : deux à Paris, les autres sur le littoral de la mer du Nord et de la Manche : Ouistreham, Dieppe, Cherbourg, Grande Synthe (Dunkerque), Calais. J'ai aimé la distinction faite entre la "jungle institutionnelle" et les autres jungles : une base de réflexion sur les acteurs et les conséquences de leurs choix.
  • Ceux de la revue Multitudes, notamment le n°64 (2016/3), avec un portfolio impressionnant mais aussi et surtout une cartographie riche établie par les étudiants de l'école d'architecture de Paris-Belleville. Une carte qui montre comment cette "jungle", ce campement s'est urbanisé, avec une rue principale, des quartiers (ethniques), en bref, une appropriation du territoire.
Docs pour la France des marges 2 : spécial Calais
  • L'article le plus riche est certainement celui écrit par Carlaluz KEISER et Lili LAINE dans la revue en ligne Urbanités (n°8, appelé joliment "Cachez cette ville que je ne saurais voir"). Un article consacré au thème d'habiter le temporaire et la contrainte : le Centre d'Accueil Provisoire de la Jungle de Calais (voir : http://www.revue-urbanites.fr/8-habiter-le-temporaire-et-la-contrainte-le-centre-daccueil-provisoire-de-la-jungle-de-calais/). Là encore une bonne cartographie du camp de Calais et de la jungle qui l'entoure. La carte, hélas, au nom trop banal de "la géographie de la jungle" est très riche en informations sur l'appropriation de ce territoire de 18 ha : rues, logements, commerces, lieux de culte, administration, lieux de soins, ... en bref, tout ce qui fait une ville (je vous renvoie à la lecture des travaux de Michel Agier cités plus haut). Autre petit défaut de la carte, après ce titre trop neutre, c'est l'absence d'échelle.

Enfin, pour mémoire, n'oubliez pas qu'entre le 11 janvier 1999 et le 30 janvier 2016, le GISTI a compté environ 170 morts sur cette frontière entre France et Grande-Bretagne, soit près de 10 par an (voir Plein Droit n° 109, 2016/2)

 

C'est à partir de tous ces documents que j'ai dessiné le croquis suivant :

(un croquis que l'on peut accompagner d'un autre, à une échelle régionale pour montrer comment une frontière pousse toujours des personnes à s'agglomérer pour mieux passer celle-ci, comment elle reste meurtrière, et -surtout en géographie- elle reste une séparation nette entre deux territoires proches mais différents, une séparation qui n'est pas forcément linéaire mais qui a gagné en profondeur avec les camps et autres Centres d'Accueil et d'Orientation sur tout le territoire. Un croquis qui rappellerait que la France n'est qu'un pays de transit pour les migrants stockés dans ces centres : des migrants qui désirent s'installer plus ou moins longtemps au Royaume-Uni).

Docs pour la France des marges 2 : spécial Calais
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