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Geobunnik

Le blog d'un enseignant qui prépare au CAPES et au CRPE en géographie à l'ESPE de Corse à Ajaccio et Corte.

Robert D. KAPLAN, La revanche de la géographie, ce que les cartes nous disent des conflits à venir.

Publié le 23 Août 2014 par geobunnik in epistemologie de la géographie

Éditions du Toucan, 2014 (paru aux États-Unis en 2012).

Que peut dire un géographe d'un livre qui a un titre si attirant et une couverture aussi peu attirante ?

 

En effet, malgré ce titre prometteur, ce gros livre de plus de 500 pages ne vous emmènera pas au cœur de la géographie contemporaine, ni dans celui de la cartographie. Il vous mènera vers une des branches les plus balisées de la géographie, celle de la géopolitique, avec un regard trop souvent déterministe : à vouloir montrer que la géopolitique se base aussi sur des éléments naturels (déserts, montagnes, steppes), Robert KAPLAN semble porter l'idée que ces facteurs ont été longtemps oubliés et qu'ils sont devenus essentiels, voire déterminants dans les choix des acteurs politiques actuels.

 

Fervent partisan de l'interventionnisme américain (au nom de la puissance, de l'impérialisme de celui-ci), Robert KAPLAN cherche à montrer que les États-Unis, pour rester la puissance dominante mondiale et pour garantir une 'pax americana' durable, doivent continuer à intervenir sur plusieurs champs d'opération, principalement moyen-orientaux mais aussi mexicain.

S'appuyant sur les travaux des principaux géopoliticiens du XX° siècle (en oubliant cependant l'apport d'Yves LACOSTE et de l'école française de géopolitique), KAPLAN commence son ouvrage par expliquer que la Guerre Froide est une période qui a vu la disparition, dans la tête des dirigeants, des repères géographiques au profit de l'idéalisme. Une logique qui, selon lui, a perduré jusqu'aux années 2000 et les guerres de l'ex-Yougoslavie (où les interventions américaines se sont faites « hors sol » : bombardements aériens) … oubliant donc la leçon de LACOSTE sur les bombardements américains dans la vallée du Mékong.

Pour étayer ses propos, ce brillant journaliste nous livre alors une leçon d'histoire de la géopolitique (un bon cours de rattrapage pour ceux qui ne connaissent pas encore cette histoire), d’HÉRODOTE à SPYKMAN, en passant par MAHAN, HAUSHOFFER ou encore IBN KHALDOUN. Logiquement, cette démonstration tend à montrer comment les États-Unis lisent le monde actuel : toujours au prisme de la puissance et de l'équilibre du monde autour du Moyen Orient et de ses champs de pétrole mais aussi autour du nouveau paradigme états-unien, celui de la menace chinoise dans le Pacifique.

A cette première partie de 200 pages succède une deuxième partie très riche de 250 pages sur la vision du monde de KAPLAN d'où il ressort :

  • Que l'Europe, "pôle majeur du monde post-industriel" se limite principalement à l'Allemagne et à la Grèce ;

  • Que la Russie est vue comme une marge mal intégrée à l'Europe. Une puissance qui reste continentale, terrestre (quid de ses vues sur l'océan glacial Arctique ?) ;

  • Que la Chine reste une puissance impériale en construction (une partie très riche, la plus intéressante du livre à mes yeux) ;

  • Que l'Inde n'est qu'une puissance secondaire, divisée, peu menaçante ;

  • Que le Moyen Orient se limite à quatre pays : l'Iran (porteur de modernité, de puissance), la Turquie, l'Arabie saoudite et Israël.

  • Que les États-Unis ne devraient pas détourner leur regard du Mexique, homme malade de l'Amérique pour KAPLAN, et surtout de la "frontera", zone dynamique qu'il ne faudrait pas cloturer afin de bénéficier ce son dynamisme.

  • Que l'Amérique du sud et l'Afrique, comme le Pacifique ou l'océan Indien ne comptent pas ou si peu.

  • Que les États-Unis doivent s'inquiéter de leur déclin face aux autres puissances et que pour limiter ce déclin doivent être toujours interventionnistes que ce soit sur leur frontière (visiblement il n'y en a qu'une, mexicaine) ou sur des champs d'opération plus lointains (le Moyen-Orient).

 

Voici en bref la vision du monde selon KAPLAN :

 

 

Robert D. KAPLAN, La revanche de la géographie, ce que les cartes nous disent des conflits à venir.
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